UNE ENTRAÎNEUSE À PART ENTIÈRE | Cycling Canada Cyclisme

UNE ENTRAÎNEUSE À PART ENTIÈRE

Par Laura Brown, médaillée olympique en 2016 et entraîneuse adjointe NextGen sur piste

C’est l’intuition d’une mère qui a poussé Laura Brown à faire du vélo. Qui aurait pu croire que les entraînements au vélodrome de Calgary mèneraient Brown au podium aux Jeux olympiques de Rio, suivi d’une carrière comme entraîneuse NextGen sur piste.

Brown a commencé le cyclisme à l’âge de 14 ans lorsque sa mère l’a inscrite au programme «Fast and the Curious» au vélodrome de Glenmore, qui cherchait à initier les enfants au cyclisme sur piste. Ce ne fut pas un coup de foudre immédiat.

« J’étais vraiment terrible, explique Brown. J’étais avec un groupe de garçons et je n’aimais vraiment pas ça au début. Heureusement, ma mère m’a forcé à continuer, et finalement je suis tombée en amour avec la piste. C’était il y a plus de 20 ans. »

À la suite d’une carrière couronnée de succès, comprenant plusieurs médailles en coupe du monde et aux championnats du monde, Brown a franchi la ligne d’arrivée pour la dernière fois en 2018. Un an seulement après sa retraite, elle a commencé à entraîner à temps plein. La transition a apporté son lot de défis et Brown devait lutter contre le syndrome de l’imposteur malgré son expertise et sa connaissance évidente du sport. « J’avais le plein soutien de Cyclisme Canada, mais je sentais que je ne connaissais pas vraiment ma place », explique Brown.

Brown, qui était auparavant gymnaste, a réalisé à quel point le cyclisme était dominé par les hommes lorsqu’elle est entrée dans le sport. À travers les années, elle dit avoir vu et vécu du sexisme en tant qu’athlète et en tant qu’entraîneuse. Le fait qu’elle venait d’un sport comme la gymnastique – qui est à prédominance féminine – et qu’elle était entourée de légendes olympiques comme Cindy Klassen et Catriona Le May Doan en grandissant ont contribué à rendre sa transition vers le cyclisme plus difficile. Brown explique que le manque de femmes dans le cyclisme était à la fois inconfortable et inconnu.

« Quand j’étais coureuse, [le coaching] était une profession intimidante. De mon point de vue, je n’avais pas l’impression que les femmes avaient leur place. On ne peut pas être ce qu’on ne peut pas voir. »

Lors de sa première Coupe du monde en tant qu’entraîneuse-chef à Minsk en 2019, elle a remarqué le manque criant de femmes lors de la réunion des directeurs sportifs. « Il y avait 50 hommes dans la salle et j’étais la seule femme. J’avais des questions parce qu’il y avait beaucoup d’informations et que c’était ma première réunion, mais je ne les ai pas posées. J’avais l’impression de ne pas être à ma place et je sentais que j’allais être jugée. »

Elle explique que la réunion n’a pas été la seule instance où elle s’est sentie intimidée. Elle et l’entraîneuse principale NextGen, Jenny Trew, ont reçu plusieurs commentaires dépréciant leurs capacités en tant qu’entraîneuses dans une profession dominée par les hommes. « Jenny et moi étions en Suisse, et les gens commentaient des choses comme ‘Ce n’est pas un travail pour les femmes’ ou ‘Où est l’entraîneur-chef?’ parce qu’ils supposent que ce sont des hommes. Pourtant, je sais que nous sommes amplement compétentes. »

Aujourd’hui, après quelques années dans le rôle, Brown reconnaît qu’être une femme dans le milieu n’affecte en rien sa vaste expérience, ses connaissances et ses qualifications. « J’essaie de ne pas me considérer comme une femme qui occupe ce rôle, mais simplement comme une entraîneuse à part entière. Je sens que j’ai une histoire unique et que je peux offrir un point de vue et une approche différents. »

Alors qu’elle continue de s’acclimater à ce nouveau rôle, Brown cherche à servir de modèle et de source d’inspiration pour les jeunes cyclistes, comme ce fut le cas pour elle en grandissant. Selon une étude canadienne des Femmes et Sport au Canada, une fille sur trois abandonne le sport avant l’âge de 16 ans. Brown a été témoin de cette statistique et veut aider à apporter des changements en soutenant et en encourageant les filles et les femmes dans le sport.

« Je ne pourrais pas imaginer une vie sans sport. Ça me brise le cœur de savoir que certaines personnes n’ont pas la possibilité d’en faire ou abandonnent prématurément car ça a changé ma vie. En tant qu’athlète et maintenant en tant qu’entraîneuse, c’est ce que je fais et j’adore le cyclisme. »

Malgré le fait que son rôle dans le sport ait changé, son appréciation pour le sport reste le même et elle continue de viser des objectifs ambitieux avec ses athlètes. Son plus beau souvenir à ce jour a été la Coupe du monde sur piste à Milton, où elle a pu voir ses athlètes performer sur la scène mondiale.

« C’était tellement spécial d’être sur place lorsqu’ils ont remporté cette médaille de bronze en janvier dernier à Milton. Il s’agissait d’une équipe NextGen et ils sont allés si vite sur leur propre piste. J’ai eu l’occasion de participer aux Jeux panaméricains à Toronto, et c’est rare d’avoir l’opportunité de courir à domicile et de remporter une médaille. C’était génial de voir les gars vivre cette expérience et de le vivre avec eux en tant qu’entraîneuse. Je sais exactement ce qu’ils ont ressenti lorsqu’ils ont franchi la ligne d’arrivée et qu’ils ont réalisé qu’ils avaient remporté une médaille. »

Brown continue d’espérer que le sport devienne plus diversifié et égalitaire. Elle croit fermement que les femmes ont besoin de plus d’opportunités dans divers rôles, non seulement dans le cyclisme, mais aussi dans le sport en général. « Nous devons avoir plus de femmes dans les postes de direction et qui siègent sur les conseils d’administration des divers clubs et organisations sportifs. »

Elle espère que davantage de femmes continueront de s’impliquer dans le cyclisme et que ce sera éventuellement la norme d’être une femme dans le sport. « C’est difficile d’être une entraîneuse car nous sommes peu nombreuses. J’espère que des personnes comme Jenny et moi-même pourront inspirer d’autres athlètes et entraîneuses dans le futur. »

Contribution spéciale pour la Journée internationale de la femme.